Cette année se met en place la nouvelle version du baccalauréat. En réalité, elle s'appliquera pleinement en 2021 lorsque les secondes de cette année seront en Terminale.
Cette génération va ainsi avoir dès cette rentrée un test de positionnement en maths et en français qui les orientera ensuite vers des groupes d'accompagnement personnalisés.
Ils découvriront cependant les principaux changements à partir de l'année prochaine. Imposée par un décret du 17 juillet dernier, cette réforme enterre les trois séries (S, ES, L) du bac général. Elles seront remplacées par des parcours liant trois matières de spécialité en 1ère puis deux en Terminale en plus d'un tronc commun. L'examen final du bac se limitera désormais à quatre épreuves écrites (français et philo + deux matières de spécialité) et un grand oral en plus du contrôle continu pour les autres matières. Une innovation critiquable et dangereuse à plusieurs points de vue.
L'évaluation permanente
Le contrôle continu induira mécaniquement un bac différent d'un établissement à l'autre. Le bachelier d'Henri IV à Paris n'aura de fait plus le même diplôme que celui d'un lycée de Seine Saint Denis, accroissant ainsi les discriminations territoriales entrevues avec Parcoursup. Ensuite, le fait que les notes de devoir compteront désormais directement pour le bac va mettre les profs en porte à faux vis à vis de parents d'élèves mécontents des mauvaises notes de leurs enfants. Pour éviter cette pression, certains profs seront tentés de surnoter faussant ainsi tout l'exercice et dégradant un peu plus encore un diplôme fortement décrié pour la faiblesse de son niveau. Enfin, cette évaluation permanente va grignoter le temps d'apprentissage puisque pour préparer les élèves aux évaluations, des devoirs blancs seront organisés, ce qui se fera au détriment du temps de cours effectif.
Un bac à la carte
À cette inégalité s'ajoute une autre puisque parmi les douze enseignements de spécialité, chaque lycée en proposera sept. Autrement dit, tous les lycées ne proposeront pas les mêmes matières de spécialités. Cela amènera une concurrence accrue entre les différents lycées. Le Gouvernement acte donc la mort du diplôme unique promouvant un baccalauréat à la carte qui avantagera non seulement les familles qui disposeront des bonnes informations, mais aussi les territoires les plus favorisés. Au lieu de s'attaquer au véritable problème du bac qui est son niveau de difficulté, le Gouvernement va en réalité accentuer la fracture territoriale. Les bons élèves venus d'établissements défavorisés auront encore moins de possibilité d'accéder à des formations supérieures d'excellence. On savait Emmanuel Macron fâché avec la laïcité, ce gouvernement peu attiré par l'égalité et M. Collomb mal à l'aise avec le concept de fraternité. On sait désormais que Monsieur Blanquer développe une vision biaisée du principe méritocratique. Les valeurs républicaines ne sont décidément pas à la fête sous ce quinquennat...
Kevin Alleno
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Quelques chiffres :
En complément :
Le bac réformé «en même temps» que la rentrée ? Libération, 13 septembre 2018
Blanquer annonce la suppression de 1 800 postes dans l’éducation nationale en 2019, Le Monde, 16 septembre 2018
L’école est-elle toujours républicaine ? Débat de la Fondation Jean Jaurès du 2 octobre 2018