Les outils de désinformation sont vieux comme la guerre et donc aussi vieux que l’humanité elle-même. Les "fake news" ont porté différents noms au long de l’histoire : intox, canular, calomnie… Aujourd'hui l’Académie les désigne par INFOX.
Les différents types de fausses informations
Aucun domaine n’y échappe et surtout pas le débat public. Politiquement, les faussaires existent, eux aussi, depuis toujours. Ils sont beaucoup plus proches de nous et plus actifs qu’on ne l’imagine. Depuis la dernière élection présidentielle aux Etats-Unis et aujourd'hui au Brésil les vérités alternatives sont un combat au sein du combat électoral.
La rapidité de propagation des infox en fait un outil de propagande très efficace. Elles utilisent les réseaux sociaux dont le principe est précisément la viralité et le partage d’information sans vérification des sources. L’incubateur est donc aussi important que le virus lui-même. On peut distinguer trois catégories d’infox.
La fake news croyance populaire. De la « rumeur d’Orléans » à l’ineffectivité des vaccins par exemple. Le cancan est un phénomène social qui s’enracine dans les esprits entretenant les croyances béates. Si l’ignorance n’est pas condamnable, elle est virale ;
La fake news manipulation est un procédé intentionnel de désinformation. En politique, notamment, il ne semble plus suffisant d’être sympathique aux yeux d’un électorat. Il faut aussi dénigrer le concurrent, le rendre antipathique pour le décrédibiliser. D’où la naissance de rumeur pour discréditer les actions et les personnes lors de campagnes électorales.
Enfin, la fake news réfutation dont Donald Trump est le plus grand utilisateur. C’est un outil peu subtil, dénué de rhétorique. Il s’agit de qualifier les propos d’un interlocuteur de fausse information. Le doute gagne l’esprit. L’intelligence s’évapore. Le débat public agonise.
Disqualifiant mécaniquement tous les arguments contraires au message officiel, l’outil séduit beaucoup la patriosphère.
Une loi anti-infox pas à la hauteur
Ces circonstances ont justifié la naissance de deux projets de loi anti-infox. Le Sénat, les a rejeté. L’Assemblée nationale les a adopté le 20 novembre dernier.
La confusion s’ajoute au dispositif existant : l’article 27 de la loi relative à la Presse, L 97 du Code électoral ou 322-14 du Code pénal notamment. Pis, la loi nouvelle vise les seules périodes électorales. La responsabilité est transférée aux fournisseurs d’accès et plateformes numériques. La sincérité du scrutin est entre les mains du juge des référés. Un parfum de censure est, ainsi, introduit dans le débat démocratique.
La loi ne traite pas des véritables sujets, telle la banalisation des infox dans le débat quotidien, la manipulation des masses ou le fair-play politique. Le danger actuel et réel est celui des fausses équivalences et l’indifférenciation des sources à l’égard desquels il est urgent d’agir.
Sylvain Le Meur
EN COMPLÉMENT :
→ Le conspirationnisme dans l’opinion publique française, Note de Rudy Reichstadt pour la fondation Jean Jaurès, 7 janvier 2018
→ Guerres d’influence : à qui servent les fake news ?, Interview de François-Bernard Huyghe, Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS), 17 décembre 2018