Les îles sont des territoires singuliers par excellence dont la Bretagne est particulièrement dotée puisqu’elle compte plus d’une dizaine de territoires insulaires, de Belle-Ile au sud, à Chausey plus au Nord.
Chaque île présente des spécificités uniques, nourries de patrimoines exceptionnels, d’histoire, de caractères, de mode de vie. Mais l’insularité qui nous identifie, parfois synonyme de contraintes, est loin des cartes postales qui séduisent les millions de visiteurs vennant découvrir ces perles de l’Atlantique. La démographie insulaire est d’ailleurs le reflet de cette réalité qui peut interroger sur l’avenir de ces lieux de vie à la symbiose parfois fragile. Belle-Ile fait partie de ces territoires insulaires, peu nombreux, qui gagnent des habitants chaque année. Un microcontinent attractif qui séduit et génère de nouveaux projets. À la croisée des chemins, l’île tend aujourd’hui à expérimenter dans de nombreux domaines, en donnant des allures de « territoire-laboratoire ». Son échelle et sa situation sont sans doute propices à l’expérimentation, dans de nombreux domaines : les déplacements, la consommation, la santé… des sujets qui fédèrent ici peut être plus qu’ailleurs.
Des bateaux plus verts ?
S’il est un sujet qui fédère les Bellilois ce sont les liaisons maritimes avec le continent dont la délégation de service public doit être prochainement renouvelée ; une concertation inédite entre les élus locaux, la Région et les usagers est en cours pour écrire ce projet commun déterminant. Le Président du Conseil régional a déjà fait savoir que l’expérimentation de nouvelles propulsions pour les prochains navires assurant la desserte de l’île sera d’actualité, l’hydrogène par exemple.
Vers la fin du carburant ?
Pour les déplacements terrestres, la voiture électrique, adaptée à la dimension de l’île, commence à se faire une place au soleil et peut se targuer de recharge écologique alimentées en partie par des panneaux solaires. L’alimentation de l’île en carburant est complexe, dangereuse et onéreuse. La question d’une autre forme de ravitaillement que par pétrolier est d’ailleurs à l’étude entre les élus locaux et la Région. D’autres énergies semblent se profiler à l’image de l’hydrogène ou des projets de méthanisation. Quant à la bicyclette électrique, elle est devenue la grande reine sur l’île, la topographie aidant à son développement. Reste à travailler sur les itinéraires cyclables. Un défi auquel élus et associations se sont attelés, rendu difficile par les surcoûts des matériaux. Mais côté recyclage, la commune de Palais fait preuve d’imagination depuis quelques années, notamment en concassant des matériaux de chantier qui sont ensuite réutilisés en voirie. La question de la gestion des déchets est cruciale sur l’île, c’est de ce constat qu’est né Le Chtal, une ressourcerie écologique et solidaire.
Sur les futurs aménagements de la ville de Palais, lauréate au dispositif Revitalisation soutenu par la Région, le développement d’équipements devraient permettre l’innovation autour de locaux à vélos électriques avec recharge intégrée ainsi que d’un concept « smart city » qui permettra de réguler le stationnement, les flux, l’éclairage public ou encore l’arrosage…
Et l’Autonomie alimentaire ?
Depuis quelques mois, et avec une accélération due à la crise sanitaire, de nombreux projets agricoles émergent. Si les quatre communes de l’île ont décidé de reprendre en main la question du foncier agricole, c’est pour permettre de conforter les exploitants locaux et installer de nouveaux porteurs de projets. Sur la commune de Palais, deux projets sont en cours, la plantation de 4000 arbres pour reboiser la commune avec des espèces nourricières et la création d’un nouveau modèle solidaire, économique et écologique de type régie maraichère pourrait alimenter la restauration scolaire ou le centre hospitalier. Cette démarche pourrait être couplée à une petite unité sociale « sur mesure » pour y accueillir des insulaires en situation de handicap.
À Belle-Ile, la production laitière dépasse les 2 millions de litres qui pour la majeure partie sont évacués vers le continent par la collectivité. Si depuis 30 ans le projet d’une grande laiterie est évoqué, il est désormais sur le point d’aboutir. Financé en partie par la Région et probablement par la communauté de communes ce projet permettra d’allier écologie, circuit-courts, emplois et de meilleurs revenus pour les agriculteurs.
Quant au Logement, c’est Le défi de la décennie.
Cette question est centrale sur l’île, car il y a d’ailleurs de l’emploi qui, confronté à cette problématique, ne peut-être pourvu de façon satisfaisante. Pour ce faire, la commune de Palais s’est lancée dans un grand projet d’accession pour les Palantins aux revenus intermédiaires. Trois hectares sont en cours d’achat par la commune pour créer des « petits villages » et permettre la construction de beaux projets de vie pour des familles. Des terrains à coûts mesurés, sur la base d’un règlement permettant des clauses anti-spéculatives innovantes d’une durée plus longue.
Enfin, la Santé : une première en France.
Construire un nouveau centre hospitalier n’a pas été une sinécure tant les défis étaient nombreux. Mais lorsqu’il s’est agi de la question d’une maison de santé, les communes ont répondu présentes, c’est ainsi qu’est née la première maison de santé pluri-communales de France. Une expérience unique qui offre une qualité de soins aux insulaires et garantie la sédentarisation des médecins libéraux. Elle permet aussi la venue de nombreux spécialistes, qui parfois consultent à distance grâce à la télémédecine.
L’avenir des îles est donc dans les mains de ceux qui y vivent, mais la fragilité et la complexité de ces territoires doivent être prises en compte et accompagnées de manière toute aussi singulière. La Région l’a bien compris notamment avec les nouvelles compétences transférées par la loi NOTRE. Des problèmes découlent des solutions sur mesure.
D’autres défis en toile de fond émergent et seront au menu des prochaines années avec toujours cette spécificité insulaire : celle de perpétuellement se réinventer.