En vingt ans, les outils de gestion de marché de la Politique agricole commune (PAC) ont été démantelés. Mais le monde idéal promis par les économistes libéraux ne s’est pas matérialisé, tant s’en faut !
Les marchés agricoles subissent aujourd’hui une succession de pics et de chutes des prix qui génère une instabilité insoutenable pour les agriculteurs, menaçant la pérennité même de leur activité.
Cette situation est totalement insupportable. Comment a-t-on fait pour oublier les leçons du passé ? Souvenons-nous des Raisins de la colère de Steinbeck. Roosevelt avait répondu à la détresse des agriculteurs américains en mettant en place des outils de régulation. En France, dès 1936, avait été créé l’Office du blé pour garantir un prix aux agriculteurs.
L’intervention publique en agriculture se justifie pour au moins trois raisons : l’instabilité naturelle des marchés et des prix ; la fourniture de biens publics non marchands par les agriculteurs ; et surtout la nécessité de garantir au citoyen l’accès à une alimentation suffisante en quantité et qualité.
Dans la PAC, il n’y a plus d’outil pour contenir la volatilité des marchés. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder la grave crise que traverse le secteur laitier aujourd’hui. Résultat : chaque pays poursuit sa propre stratégie, conduisant à une véritable cacophonie européenne !
Trois axes à défendre
Il n’y a donc aucune autre alternative que de réintroduire des mécanismes européens de régulation des marchés. Le ministre français de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, est à l’offensive, mais il n’est pas assez soutenu sur l’échiquier européen. Les Régions d’Europe peuvent peser dans la balance.
Compte tenu de la place centrale de l’agriculture dans l’économie et les territoires bretons, la Région Bretagne a un rôle à jouer. Je me propose de rassembler l’ensemble des acteurs agricoles bretons pour qu’ensemble, nous puissions définir nos propositions autour de trois axes et aller ensuite les porter auprès du ministère de l’Agriculture puis à Bruxelles.
Ces trois axes sont les suivants :
– Affronter l’instabilité des marchés grâce à des exploitations plus résilientes. Le Conseil régional de Bretagne œuvre déjà en ce sens, notamment avec le financement de mesures agro-environnementales. Cette action doit être renforcée pour faire de la Bretagne une région en pointe en termes d’autonomie des exploitations (fourragère et protéique notamment) et de réduction de l’utilisation d’intrants.
– Renforcer l’organisation des producteurs. Dans la filière laitière, face aux oligopoles de l’aval, les producteurs n’ont d’autre choix que de se rassembler pour détenir un vrai pouvoir de négociation. Les organisations de producteurs (OP) actuelles doivent se réunir au sein d’une association d’organisations de producteurs (AOP), au minimum à l’échelle du bassin laitier grand ouest (35 % du lait français), c’est-à-dire plus que la production irlandaise.
– Réintroduire des mécanismes de régulations dynamiques au cœur de la PAC. Il nous faut inventer les outils de demain et être innovants. Pour cela, pas de tabou, toutes les propositions qui sont sur la table doivent être étudiées attentivement, d’où qu’elles viennent.