Les sénateurs ont entamé le 21 mars l’examen du projet de loi sur les OGM. Annoncé dans un premier temps en procédure d’urgence, afin de prévenir la France de sanctions financières pour transposition tardive des Directives européennes sur les OGM, le texte sera finalement débattu “à l’arraché” mais sans grande concertation préalable. L’opposition à ce texte se fait pourtant entendre : une manifestation régionale – soutenue par la Fédération du Parti socialiste du Morbihan s’est tenue à Vannes, samedi 8 avril, et a réuni entre 8000 et 12000 personnes. La Région Bretagne a quant à elle déjà pris des mesures pour préserver les filières sans OGM
La loi contraint dorénavant à déclarer les surfaces d’OGM au ministère de l’Agriculture. Un registre national des communes accueillant des cultures transgéniques sera rendu public. C’est donc la fin de la culture secrète de quelques 500 parcelles OGM en France (dont plus d’un millier d’hectares de maïs), réclamée depuis plus de trois ans par les socialistes.
Pas de mention du principe du précaution
Le reste du projet de loi relève de l’inacceptable. Est ignoré par exemple le principe de précaution mentionné dans la Directive européenne, et introduit dans la charte de l’environnement française adoptée en 2005.
Les autorisations de mise sur le marché sont limitées à 10 ans, et l’étiquetage des produits composés d’OGM devient obligatoire, au-delà des 0,9 % réglementaires. Ce seuil arbitraire, résultat d’un consensus politique européen et non d’études scientifiques indépendantes, consacre de fait la coexistence des filières OGM et non OGM. Il anticipe la contamination, alors que le règlement européen prévoit la possibilité de fixer des seuils inférieurs, en particulier dans le cas des OGM utilisés à des fins alimentaires.
Comment faire cohabiter les filières ?
En cas de contamination, le projet de loi prévoit un fonds d’indemnisation, abondé par les exploitants d’OGM et plafonné à 100 euros l’hectare. Les parlementaires UMP évoquent une taxe de 10 euros par hectare et par an. Les firmes détentrices des brevets sur les semences ne sont par ailleurs pas sollicitées, et la perte d’un label ne sera pas prise en charge (quid des cultures bio ?).
Un Conseil des biotechnologies est créé, composé d’experts ainsi que de membres des filières agricole et OGM et d’associations écologistes. Son rôle est limité à l’autorisation d’essais ou de mise sur le marché de produits OGM), il n’est pas compétent pour surveiller les risques de dissémination des cultures ou pour réclamer des études sanitaires et environnementales aux firmes biotechs.
Il est regrettable que sur un sujet aussi passionnel, mêlant les peurs irrationnelles au scepticisme quant à l’évaluation des risques, une loi fondatrice sur les biotechnologies n’ait pas vu le jour. Outre l’encadrement éthique et économique du développement des OGM, il est urgent d’organiser celui de la recherche tant publique que privée dans ce domaine : alors que l’Europe et la France (particulièrement dans le domaine biomédical) disposent d’atouts sérieux, leurs positions respectives dans les dépôts de brevets en biotechnologies tendent à s’éroder. Or la maîtrise de cet enjeu stratégique de l’ économie de la connaissance est aussi un gage d’indépendance sur la scène internationale.
Olivier Le Lamer
Secrétaire fédéral au Développement Durable, à l’Environnement et à la Recherche