Les sénateurs et députés bretons
Madame la Ministre,
Par le présent courrier, nous avons l’honneur d’attirer votre attention sur la question de la constructibilité des espaces intermédiaires, non construits et entourés de parcelles bâties dans les hameaux. La multiplication des obstacles réglementaires soulève en effet de nombreuses incompréhensions chez nos concitoyens, particulièrement en Bretagne où l’urbanisation s’est fondée depuis des décennies sur le développement des hameaux, sans que la constructibilité des dents creuses ne porte atteinte à la préservation de la terre agricole, ni au paysage.
Nous souscrivons bien évidemment à l’objectif premier de la loi Littoral afin de protéger nos côtes du bétonnage spéculatif mais son application dans des territoires plus reculés et sans lien direct avec le littoral demeure trop souvent source de multiples complications qui donnent lieu à une inflation contentieuse. Grâce à la notion de « hameau nouveau intégré à l’environnement », un certain assouplissement a cependant pu être apporté aux possibilités de construction à l’intérieur des périmètres bâtis des hameaux (cf. décision n° 360902 du Conseil d’État du 3 avril 2014). Cette évolution a été bien accueillie par les élus locaux, désireux de développer leur territoire de manière cohérente, responsable et soutenable.
Malgré d’appréciables avancées, la loi ALUR est néanmoins venue complexifier et insécuriser encore davantage la caractérisation réglementaire des dents creuses, directement à l’origine du mouvement de contestation dit « des PLUmés ». A l’occasion de successions, des difficultés peuvent en effet survenir sur des fiscalités appliquées à des terrains jusque-là constructibles, tout comme des recours portant sur des terrains aujourd’hui déclassés. Face à cette législation instable, couplée aux interprétations locales du droit, les élus locaux se sentent quelque peu désarmés pour répondre aux familles concernées pour qui cette dépréciation brutale d’un patrimoine souvent restreint représente un véritable coup de massue.
Dans le cadre des réponses que vous avez bien voulu déjà apporter, vous avez reconnu la nécessité d’amplifier l’accompagnement des collectivités pour leur permettre de s’approprier effectivement les possibilités réglementaires qui leur sont offertes. À l’Assemblée nationale, vous avez aussi rappelé que « certains hameaux n’ont pas vocation à être densifiés puisque les documents d’urbanisme ne l’avaient pas prévu quand d’autres endroits méritent à l’inverse une expertise collective plus poussée. » Au Sénat, vous avez indiqué que nous devions « nous entendre sur la notion de hameau ».
En complément de l’Instruction du Gouvernement du 7 décembre 2015 relative aux dispositions particulières au littoral du code de l’urbanisme qui n’apporte pas toutes les réponses attendues, il est donc urgent de pouvoir disposer au plus vite d’une nécessaire clarification sur ce sujet très sensible.
Nous vous remercions pour l’attention que vous voudrez bien accorder à cette demande commune et nous vous prions de croire, Madame la Ministre, à l’expression de notre très haute considération.
Sénateurs :
Députés :
Copie à Madame Ségolène ROYAL, Ministre de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, chargée des Relations internationales sur le climat
→ EN COMPLÉMENT via le site de François MARC, Sénateur du Finistère
Loi littoral : La capacité d’action des élus améliorée
Le 3 janvier 1986 était promulguée la Loi littoral. Trente ans après, une instruction ministérielle vient d’apporter des ajustements appréciables pour les élus.
Rendue publique le 17 décembre 2015, cette instruction ministérielle insiste sur la collaboration entre les collectivités et les services préfectoraux ; ces derniers étant appelés à mieux accompagner les collectivités territoriales dans l’application de la loi Littoral, en particulier lorsqu’il s’agit d’intégrer ses dispositions dans les documents d’urbanisme et de planification. Il est effectivement possible d’intégrer les dispositions de la loi Littoral dans les SCoT (schéma de cohérence territoriale) et les PLU (Plan Locaux d’Urbanisme) depuis la loi Grenelle II, ainsi que dans le SRADDT (schéma régional d’aménagement durable du territoire) depuis la Loi NOTRe.
Cette instruction ministérielle renforce donc la capacité d’ajustement conférée aux élus locaux, en matière d’application de la Loi littoral. C’est bien là qu’est la nouveauté, trente ans après la promulgation de cette bonne loi qu’est la Loi littoral.
Invité par l’Association des maires du Finistère à préciser les choses en matière d’application de la Loi littoral, Mr Antoine DURUP de BALEINE, Premier Conseiller à la Cour Administrative d’Appel de Nantes, Rapporteur public à la 5ème Chambre de la Cour, avait bien noté le rôle-clé des documents d’urbanisme. Selon ce spécialiste, la seule notion qui vaille en la matière est celle de « DENSITÉ SIGNIFICATIVE DES CONSTRUCTIONS« .
Lors des cette Rencontre des communes littorales de Bretagne en octobre dernier, avait été donnée une définition jurisprudentielle du « hameau nouveau intégré à l’environnement », des plus utiles aux élues pour leur gestion locale.
Cette définition jurisprudentielle émanait d’une décision du Conseil d’État relative à un dossier de Bonifacio. Dans cette décision N°360902 du 3 avril 2014, le Conseil d’État précise ceci :
- – Le « hameau nouveau intégré à l’environnement » doit être prévu par le Plan Local d’Urbanisme, ce qui signifie que quand il n’y a pas de PLU (ou de carte communale), il n’y a pas de hameau nouveau intégré à l’environnement.
- – C’est donc une zone délimitée par le PLU dans laquelle celui-ci prévoit la possibilité d’une extension de l’urbanisation de faible ampleur, intégrée à l’environnement par la réalisation d’un petit nombre de constructions de faible importance (entre 10 et 20 environ), proches les unes des autres, et formant un ensemble dont les caractéristiques et l’organisation s’inscrivent dans les traditions locales. Ceci ne change cependant rien pour ce qui concerne le mitage éclaté.
Les élus ont donc aujourd’hui une carte à jouer.
À consulter :
– Question Écrite.
– Instruction ministérielle du 07.12.15
– Décision du Conseil d’État N° 360902
– Fiches techniques