Violences faites aux femmes : des politiques de prévention nettement insuffisantes

Lors du dernier Conseil municipal de Lanester le groupe Front de gauche a soumis un vœu réclamant la réouverture de l’accueil de jour « Un moment pour Elles » de Lorient. Cette association dédiée à l'accueil des femmes victimes de violences doit fermer suite au désengagement financier de l'Etat. Annaïg LE MOËL-RAFLIK est intervenue pour présenter la position du groupe socialiste et aborder de manière plus globale la question des violences faites aux femmes.  

« Les violences faites aux femmes constituent un véritable fléau sanitaire et social. Les chiffres issus des grandes enquêtes : ENVEFF, VIRAGE interpellent et rappellent la nécessité de lutter contre les violences intra-familiales. La Loi Égalité du 4 août 2014 marque un tournant majeur en France en matière d’accompagnement des femmes.

Les répercussions économiques et sanitaires des violences constituent un véritable problème de santé publique, là où les politiques de prévention sont encore nettement insuffisantes dans notre pays. Les cadres juridiques et la volonté politique, sur le plan international, européen et national ont beaucoup évolué pour prendre en compte la nécessité de protection des femmes et de leurs enfants et l’élimination de toutes les formes de violences. La prise de conscience de l’opinion est plus forte grâce à la médiatisation de l’affaire Weinstein ou encore plus récemment du mouvement "me too" jusqu’au fameux hashtag "balance ton porc".

Certaines victimes vont pouvoir verbaliser, se confier sur ce qu’elles vivent, d’autres n’oseront jamais avoir recours à un professionnel ou repartiront avant même de taper à la porte du lieu connu et identifié. L’enjeu est bien d’Accueillir, de repérer, de soigner, de protéger et d’orienter les femmes victimes de violence, désireuses de briser le silence et dénoncer ce qu’elles vivent. Ces cinq verbes retracent le parcours d’une femme. Mais c’est un long processus psychique que de se défaire de l’emprise d’un homme violent qu’elles aiment ou ont aimé, qu’elles protègent aussi parfois. Entre le premier épisode de violence conduisant une femme vers l’hôpital et son réel départ du foyer, il peut se passer plusieurs mois, voir des années…

Chaque année, en France environ 120 femmes et 25 hommes sont tués par leur conjoint-e ou ex conjoint-e.

143 000 enfants vivent dans un foyer où une femme a déclaré être victime de violences. 35 enfants mineurs ont été tués dans le cadre de violences au sein du couple.

Selon la MIPROF : Mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences et la lutte contre la traite des êtres humains, près d’une femme sur 10 connaît ou a connu un contexte de violences intra-familiales. En janvier 2017, l’enquête VIRAGE « Violences et rapports de genre » a publié ses premiers résultats en matière de violences sexuelles. Une femme sur vingt a vécu au cours de sa vie une ou plusieurs agressions sexuelles dans le cadre de la famille ou des relations avec les proches, et ces agressions sont marquées par un degré́ de gravité important.

Selon l’INSEE, sur 100 victimes de violences, 27 déclarent avoir recours à un médecin, notamment aux urgences ou auprès de leur médecin traitant, 20 se tourneront vers le commissariat ou la gendarmerie, 17 vers les services sociaux et seulement 10 iront rencontrés une association.  52 n’ont recours aucune démarche…

La fréquence des violences subies est relativement homogène selon les catégories socio professionnelles.

Une fois ces constats posés sur ce fléau, revenons-en au vœu et à l’interpellation du Front de Gauche sur le sujet, à l’heure où le Gouvernement a choisi d’en faire une priorité absolue du début du quinquennat que nous saluons.

Les permanences 2 fois par semaine tenues par « Un Moment pour elles », montage partenarial entre la sauvegarde 56 et le CIDFF 56 et ouvert à la suite de la venue de la secrétaire d’Etat Najat Vallaud Belkacem en 2013 ont été fermées car la préfecture du Morbihan a supprimé des moyens issus du FIPD : fond interministériel de prévention de la délinquance pour les déployer sur d’autre priorités. Le département du Morbihan n’était pas partie prenante bien qu’il ait dans leurs compétences la protection des enfants et l’accompagnement des publics fragiles comme les majeurs vulnérables.

L’interpellation des collectivités en conclusion du vœu pose la question de nos limites et le groupe socialiste s’abstiendra, tout en rappelant que les femmes qui subissent des violences sont accueillies aujourd’hui et prises en charge sur notre territoire, via les dispositifs régaliens et de droits communs. L’accompagnement social et psychologique, pour répondre à Jean Yves Le Gal, est toujours assuré mais autrement et je peux t’assurer que mes collègues, hélas, constate depuis plusieurs mois une augmentation de l’activité, notamment à l’hôpital dans les différents services : Social ou à l’UAMJ lorsqu’elles ont franchi le pas de la plainte.

Est-ce bien aux mairies, aux intercommunalités de compenser les désengagements des préfectures sur le sujet ?

En matière de violences, selon une auteure Elisa Herman : « la dimension territoriale des politiques de lutte contre les violences envers les femmes s’exprime par différents aspects. Elle est le fruit des ancrages locaux propres aux histoires des associations militantes. (…) L’inscription locale des politiques publiques est donc forte d’un maillage institutionnel qui réalise des actions de manière diversifiée selon les régions. (…) ». Ce qu’il manque aujourd’hui sur notre territoire, c’est bien une instance du type comité de pilotage et de concertation où chaque acteur pourrait élaborer, travailler, évaluer ensemble les plans d’action nationaux parmi lesquelles l’Hôpital, les services régaliens de l’Etat, les collectivités territoriales, et surtout le département. Dans le département voisin du Finistère, le département a impulsé cette dynamique bien avant les évolutions législatives récentes.

Les associations militantes féministes sont peu implantées sur notre territoire : à l’exception du mouvement du NID sur Lorient et de l’association « l’abri côtier » sur le pays de Quimperlé. Le CIDFF tient des permanences juridiques dans les communes de Lorient et Lanester. L’ADAVI du Morbihan, qui prend en charge les femmes après dépôt de plainte, tient des permanences juridiques sur le territoire et a intégré 2 demies journées par semaine l’UAMJ du GHBS. "Un moment pour elles" était lieu de relais pour les femmes qui n’étaient pas convaincus d’avoir recours à la judiciarisation; elle permettait de les accompagner au fil des mois et des années…»

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