« La caste. Enquête sur cette haute fonction publique qui a pris le pouvoir ». Ce titre résume bien l’enquête journalistique qui s'est appliquée à tous les gouvernements – Gauche incluse hélas.
Le pantouflage : Un doute sur la loyauté
La Caste visée ici par Laurent Mauduit est une oligarchie formatée surtout par l'E.N.A. Un ancien énarque la qualifiait, par dérision, d' « Exacerbation de la Névrose d'Ambition ». Les premiers diplômés de cette école se retrouvent à l'inspection générale des finances. Les suivants à la Cour des Comptes ou au Conseil d'État. Le « pantouflage », régulièrement pointé comme un problème, consiste à quitter le secteur public pour le privé, souvent des grandes entreprises du CAC 40. Il y a aussi des cas de « rétro-pantouflage » (retour du privé vers le public). Ce phénomène interroge sur la fidélité et la loyauté au service public. Viennent-ils dans le public par amour du service public ou pour se mettre au courant des dernières stratégies du public qu'ils pourront monnayer ensuite dans le privé ? Cette question se pose notamment avec une grande acuité en matière fiscale.
La pensée unique en partage
Selon Laurent Mauduit, ces « élites » exigent toujours moins d'impôts, d'État, de déficit, de protection et de réglementation sociales mais plus de privations.
Ces diktats sont imposés, selon lui, par des directeurs d'administrations, à des ministres – même de Gauche, hélas ! Ces choix sont imposés à ceux qui n'ont pas une volonté politique basée sur des principes intangibles. Ce phénomène interroge également sur le niveau des ministres mis en place qui se retrouvent parfois manipulés par leurs services sans être en mesure de leur imposer l'autorité du politique. Cela questionne mécaniquement l'aspect démocratique car ce sont les politiques qui sont élus, pas les fonctionnaires, si brillants soient-ils.
Depuis trois décennies, on observe ce paradoxe où ces personnes, qui naviguent entre le privé - et des rémunération confortables - et le public (et un traitement confortable également), exigent des salaires en augmentation réduite pour les autres, ajoutant que la France vit « au-dessus de nos moyens » et qu'il faut donc conduire des « réformes structurelles » c'est-à-dire des coupes sociales. Leur référence est Margaret Thatcher et son T.I.N.A. (There is no alternative).
Tout cela débouche sur une pensée unique : celle du « en même temps » qui n'est « ni de Gauche, ni de Gauche ». C'est cette oligarchie qui a promu l'un des siens au sommet de l’État : Emmanuel Macron élu grâce au rejet de l’extrême droite. Pour lui, selon Mauduit, « toutes les questions sociales se réduisent à leur aspect comptable ».
La Gauche commence (enfin!) à se redresser. Ses parlementaires, alliés - pour la circonstance - à la Droite Républicaine - s'engagent pour un référendum d'initiative partagée contre la privatisation d'ADP, joyau du patrimoine national mais il faut réunir 4,7 millions de voix, soit 10% de l'électorat. La protection du patrimoine national est un enjeu majeur. La mobilisation militante est d'autant plus importante que certaines élites ont, semble-t-il, fait le choix de brader le patrimoine public au nom d'une certaine idéologie.
Claude Saada
En complément :
EXCLU - La liste de ceux qui ont croqué dans la vente d'Alstom à General Electric https://t.co/xbDA0pqw81
— Marianne (@MarianneleMag) September 27, 2019
→ Brève histoire de la haute fonction publique, Article de Jean-Christophe Plot, Vulgarisateur historique
→ La réaction de la haute fonction publique au mouvement des «gilets jaunes», vue de l'intérieur, Tribune rédigée par un haut fonctionnaire anonyme pour Slater.fr, 12 décembre 2018
→ Supprimer l’ENA, ou tempérer le mépris d’État , Article d'Aurélien Corson, The Conversation, 4 septembre 2019