Vendredi 1er Novembre les premières mesures de la réforme de l’assurance-chômage sont entrées en vigueur. Le deuxième train de mesures sur les nouvelles modalités de calcul du montant des indemnisations entrera en vigueur au 1er avril.
Si de nouveaux droits sont ouverts pour certains employés démissionnaires ou pour certains indépendants, la réforme se traduit surtout par un durcissement des conditions pour avoir droit aux indemnisations. Les agents de Pôle -emploi en prennent le vertige chaque jour.
Une réforme autoritaire de l’État
Les mesures mises en place ne sont pas issues comme habituellement d’une nouvelle convention d’assurance chômage. Il y a eu un échec des négociations avec les partenaires sociaux et dans cette période de carence, c’est bien l’État qui a repris la main sur la réglementation et qui a édité ces règles qui constituent la réforme de l’assurance chômage et qui paraissent dans des décrets publiés au journal officiel du 26 Juillet.
L’objectif annoncé de la réforme est de réduire le déficit de l’Unedic en économisant 3,4 milliards d’ici fin 2021 et de lutter contre les contrats courts et la permittence. Il faut savoir que 87 % des nouvelles embauches se font sur durée déterminée ou sur des contrats intérim. Quand elle a présenté la réforme, la ministre du Travail Muriel Pénicaud avait promis qu’il s’agissait d’une réforme « contre la précarité ». Le durcissement des conditions d’entrée à Pôle-emploi permet d’en douter.
Un impact sur le RSA
Laurent Berger n’a pas hésité à affirmer que cette réforme «est néfaste pour les demandeurs d'emploi ». L’Unedic confirme que près d’1,4 millions de demandeurs d’emploi, parmi les 2,7 millions qui bénéficient actuellement d’une indemnisation, seront concernés par la réforme – sur, au total, 6 millions de personnes inscrites à Pôle-emploi. Avec cette réforme, on rentre dans une forme de trappe à pauvreté pour ces demandeurs d’emploi, soit parce qu’ils ne pourront pas s’ouvrir de droits, soit parce que leur droit à l’assurance-chômage va être raccourci, soit parce qu’ils auront un montant inférieur au montant auquel ils auraient pu prétendre avec les anciennes règles. Au total, la moitié des personnes indemnisées – principalement celles qui n’ont pas pu travailler à temps plein pendant au moins un an – vont voir leurs droits réduits, voire supprimés. Le gouvernement n’a semble-t-il aucunement pris la mesure du risque important d’un report vers les minimas sociaux pour les personnes qui perdront leurs droits à l’indemnisation. Il y aura une chute brutale des montants d’indemnisation pour celles et ceux qui ont des périodes de travail hachées. Beaucoup de gens vont devoir aller émarger au RSA. Ce qui alourdira mécaniquement la charge des Départements qui subissent déjà le désengagement de l’État.
À partir du 1er novembre, pour pouvoir ouvrir des droits, il faudra avoir travaillé 6 mois au lieu de 4 (soit désormais 910 heures, ou 130 jours). Quant à la période sur laquelle l’Unedic se penche pour comptabiliser les heures passées à travailler, elle baisse de 28 à 24 mois. Certaines personnes qui, dans l’ancien système, auraient pu être indemnisées en ayant travaillé par exemple 6 mois sur les 28 derniers mois, n’auront plus accès à l’assurance-chômage. Auparavant, il fallait avoir travaillé en moyenne un jour sur sept pour ouvrir ses premiers droits. Il faudra désormais avoir travaillé un jour sur quatre.
Les conditions du « rechargement », permettant de préserver ses droits si l’on travaille en parallèle de sa période d’indemnisation, sont également durcies. La modification des règles de calcul qu’induit la réforme rendra plus difficile le cumul de petits boulots et de l’assurance-chômage.
Avec le nouveau mode de calcul de la réforme de l’assurance chômage, comprenons le bien, ce sont celles et ceux qui subissent les méandres du travail précaire, comme les intérimaires et les personnes qui enchaînent les CDD, qui vont devoir assumer les plus gros efforts financiers, et subir les restrictions les plus pénalisantes sur leur vie. Une preuve, s’il le fallait encore, que ce Gouvernement est décidément est bien à droite.
Estelle Picard
En complément :
"Les 5 % de Français les plus pauvres devraient voir leur niveau de vie se réduire d’environ 240 euros par an sous l’effet des mesures entre 2018 et 2020. Dans le même temps, les 5 % les plus riches devraient voir le leur grimper de 2905 euros par an" https://t.co/dFn6dCL4nJ
— Luc Bronner (@lucbronner) February 5, 2020
Réforme du chômage : Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT "appelle les Français à prendre conscience de ce qui est en train de se passer" pic.twitter.com/V1PnghXZEm
— franceinfo (@franceinfo) November 1, 2019