Parcours de militant : Philippe MEYER

Figure historique du PS en Morbihan et de Vannes en particulier, tu es toujours actif lorsqu’un qu’un débat est d’importance, ou lorsqu’il s’agit de voter dans tout ce qui intéresse la vie de notre parti, ou encore par ta disponibilité quand ton conseil est souhaité. Je ne vais pas te dresser ici une couronne de lauriers car je sais que tu n’aimes pas la flatterie. Je souhaiterais t’interroger sur hier, aujourd’hui et demain.

Un peu sur hier et ton parcours. Beaucoup sur aujourd’hui et ta vision de cette passe difficile que traverse le PS que nous aimons tant puisque nous n’avons pas déserté dans la difficulté. Énormément sur demain car, lorsqu’on te sollicite, ce n’est pas pour hier et encore moins avant-hier mais pour ton sentiment sur l’avenir.

Alors sur hier ?

Cette année 2021 je suis dans ma 51ème année d’adhésion au Parti Socialiste, cela me donne le recul nécessaire pour évaluer, non pas juger, les péripéties, parfois tumultueuses, de son existence dans le Morbihan au cours de ce demi-siècle. Le Parti Socialiste ne vient pas de rien, il est l’héritier direct du parti de Jean Jaurès mais aussi de socialistes bretons animés, notamment, par Émile Masson, père de Michel qui sera Maire de Pontivy (1971-1983).

Lors de la rupture de 1920, le Morbihan est resté fidèle à Léon Blum. Cette filiation s’est retrouvée avec Jean LE COUTALER puis Yves ALLAIMAT pour se poursuivre avec Jean-Yves LE DRIAN dont nous ne pouvons pas oublier le rôle dans le développement du Parti Socialiste ni justifier sa position actuelle notamment au plan régional ! Au cours de ces cinquante années, beaucoup ont marqué durablement le paysage politique du Morbihan, Jean GIOVANELLI  et tous ceux qui se sont battus ensemble pour faire évoluer ce département : les conseillers généraux, les conseillers régionaux, plus récents, les maires, tous les élus et les militants au premier rang desquels il y a les premiers secrétaires fédéraux, les secrétaires de section, les Permanents et la foule de ceux qui, espérant un avenir plus juste, ont partagé un bout de chemin avec les socialistes.

Le Congrès d’Épinay puis les Assises du Socialisme (1974) ont pesé beaucoup dans l’expansion du PS dans le Morbihan. Ils ont été le signal de l’ouverture à de nouveaux militants issus de la CFDT, des mouvements catholiques de Gauche, des Régionalistes et de diverses couches de la société qui, jusque-là, étaient rebutés par une certaine forme de sectarisme laïcard qui n’était que de façade. La réalité des vieux militants était en effet beaucoup plus complexe que les discours le laissaient souvent entendre.

La Fédération PS du Morbihan a joué tout son rôle dans la montée de la Gauche en Bretagne en participant à la création et au développement du BREIS et en gagnant peu à peu des communes et des cantons dans des secteurs d’où nous étions exclus depuis des lustres.

C’est cette large ouverture qui a permis au PS de gagner la première place à gauche dans le Morbihan, de multiplier par trois le nombre d’adhérents et le nombre de sections. J’ai en tête les chiffres de l’Est du département : en 1970 nous étions une vingtaine répartis entre les circonscriptions de Vannes et de Ploërmel, en 1981 nous étions plus de trois cents uniquement dans la circonscription de Vannes, répartis entre treize sections. Cette réussite a été obtenue, et pas seulement dans le Morbihan, par une volonté d’ouverture et d’accueil. Ainsi le Parti Socialiste s’est élargi à toute une large partie de la gauche et est devenu un lieu de débats et d’échanges, ce qui a construit la victoire de 1981.

Ensuite sur aujourd’hui ?

Certains groupes minoritaires n’ont pas supporté leur position à l’intérieur du Parti. Cela s’est ressenti quand les « frondeurs » ont refusé de soutenir la politique de François HOLLANDE appliquée par Manuel VALLS. Leurs diverses oppositions se sont conjuguées pour s’opposer au gouvernement soutenu par la majorité des socialistes. Les divisions apparaissant au grand jour, les électeurs n’ont pas compris que le débat interne puisse s’exprimer à l’extérieur du PS en oubliant qu’ils lui avaient confié le sort de la France.

La sanction est arrivée très vite : 2014 municipales, 2015 départementales et Régionales, 2017 Présidentielle et législatives où le rejet fut accentué par l’attitude opportuniste de nombreux députés sortant qui ont rallié LRem pour sauver leur siège. C’est, je crois, la pire saignée subie par le Parti Socialiste depuis le départ des communistes en 1920 et, comme à cette époque, j’oserai dire que « nous gardons la vieille maison ». Aujourd’hui, bien que dirigeant de nombreuses communes, départements et régions, le PS est, pour le moins, anémié. Le nombre d’adhérents dans le Morbihan en est la preuve. C’est pourquoi nous devons taire les querelles de personne ou pour des postes et recentrer nos efforts sur deux points essentiels - renforcer la base militante en ouvrant le débat à tous ceux qui souhaitent participer à nos réflexions - reconquérir l’électorat socialiste qui existe mais qui souhaite pouvoir nous redonner sa confiance.

Enfin et surtout sur demain ?

Plus que jamais le Parti Socialiste doit être le rassembleur de la Gauche dans le respect de sa diversité et dans un esprit de tolérance qui a été longtemps sa marque. Cela n’implique pas de rejeter les ambitions des uns et des autres. Elles sont légitimes et la compétition est un des moteurs qui fait avancer les sociétés dans le respect de chacun et la tolérance pour tous. Nous devons avant tout nous pencher sur nous-mêmes, être exemplaires dans notre expression et nos actes publics et nous rappeler lors des confrontations internes ou externes qu’un militant socialiste n’a pas de certitudes mais des convictions. Des échéances électorales importantes, elles le sont toutes, nous attendent dans les quatorze mois qui viennent. Donnons-nous des objectifs ambitieux. Pour les élections départementales : doubler le nombre de conseillers de Gauche malgré la défection de ceux qui ont ou vont changer de drapeau. Pour les élections régionales : renouveler le mandat de la gauche contre nos anciens adversaires mais aussi contre ceux qui, sous prétexte de rassemblement, font renaître le centrisme. Quant à l’élection présidentielle le débat doit impérativement aboutir à une candidature de large rassemblement de la Gauche sous peine qu’elle soit éliminée. Et pour longtemps.

propos recueillis par Jean-Paul MÉHEUST

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