Réflexions sur le 8 mars

Cette journée, bien que partant d’un bon sentiment, n’est qu’une représentation de plus de l’incapacité de chacun à reconsidérer son rapport à la femme.

J’entends déjà au loin les railleries face à ce discours de « féministe » car oui la journée des femmes c’est toute l’année. Prôner l’égalité homme-femme n’est pas une position féministe mais humaniste. Trop de gens cherchent à caricaturer la position féministe, renvoyant sans cesse à des mouvements sociaux plus extrêmes comme Les Femen. Ce texte n’a pas vocation à blâmer les hommes car ce ne sont pas les seuls responsables. Les femmes aussi véhiculent des représentations qui nuisent à la prise au sérieux de ces inégalités. Et même plus ; aujourd’hui dans les cours de récréation des collèges et des lycées, ce sont les filles qui profèrent le plus d’insultes envers les jupes, les robes, la féminité. Ce basculement pose de sérieuses questions. Interrogez vos enfants, petits-enfants ou de jeunes collègues ; les réponses à certaines questions sont parfois surprenantes. Certaines jeunes filles ne mettent de jupe que sur « mobilisation générale » car si elles font masse, les insultes et provocations seront moindres.

Rappelons quelques chiffres : 40% des femmes sont confrontées au sexisme au travail, seulement 3% des PDG sont de sexe féminin, une femme décède tous les trois jours sous les coups de son conjoint, 14,5% des femmes sont victimes de violences sexuelles pour 3,9% pour les hommes. Je m’arrête là pour ces quelques chiffres car ils sont connus de tous et c’est bien là le problème.

Le statut des femmes en politique : un sujet tabou

L’objectif n’est pas d’adopter une position victimaire mais bien de relater une attitude globale et inacceptable. Une femme qui se maquille, qui porte des jupes, des talons ou tout simplement qui est une femme ne semble pas pouvoir trouver légitimement sa place. Du moins, si sa place est légitime, elle se voit rabâcher que son statut, elle l’a obtenu par des moyens autres que par son sérieux et ses capacités de travail. Je fais de la politique depuis seulement trois ans et pourtant je ne compte déjà plus les remarques sexistes à mon égard, aussi bien par des opposants que lors d’opérations de tractage, de porte à porte ou autre rencontre directe. La dernière en date étant une remarque d’un opposant : « Le PS a sorti la jupe pour atteindre les 6% ». Cette attitude me choque profondément et bien qu’ayant hésité à la relater, il me semble important d’en faire part. Les femmes en politique subissent une vraie pression. Trop souvent considérées comme des adversaires plus faibles que nos confrères, être une femme en politique est trop souvent un sport de combat.

Beaucoup de femmes engagées en politique et avec qui j’ai pu échanger m’ont fait part de leurs doutes. Beaucoup m’ont avoué avoir voulu abandonner la politique plus d’une fois face aux pressions qu’elles pouvaient subir et à leur difficulté à être prise au sérieux.

C’est collectivement ; au travail, en politique, chez soi que cela se joue. Ces représentations archaïques sont déplorables. Si des marches, des rassemblements peuvent faire entendre la voix d’une société plus égalitaire pour les femmes, c’est avant tout un combat quotidien.

Sarah JORON

EN COMPLÉMENT :

Femmes et précarité, Note de Dominique Meurs pour la Fondation Jean Jaurès, 26 février 2019

L’inquiétant recul des droits des femmes dans le monde, Note de Ghislaine Toutain et Amandine Clavaud pour la Fondation Jean Jaurès, 10 mai 2019

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